Depuis samedi 10 avril, et jusqu'au 23 mai, l'ancienne capitale des Etats de Savoie,
Turin, dont
Nice dépendit jusqu'en 1860, est le théâtre d'une grande manifestation religieuse à laquelle participeront près de trois millions de fidèles dont le pape
Benoît XVI, attendu le 2 mai prochain :
l'ostension (ou exposition)
solennelle du Saint Suaire. Traditionnellement, cette présentation de la plus précieuse (et l'une des plus controversées) des reliques de l'église catholique se déroule tous les 25 ans, à chaque année sainte. La dernière ostension, dite du Jubilé, avait eu lieu en l'an 2000, deux années après une autre exposition exceptionnelle commémorant le centenaire de la première photographie du
linceul effectuée en 1898 par
Secondo Pia. L'ostension de 2010 est exceptionnelle, non seulement parce qu'elle se déroule en dehors des dates habituelles mais aussi parce que, pour la première fois, il sera possible de voir directement le
Saint Suaire après l’intervention conservatoire à laquelle il a été soumis en 2002.
Rappelons que le Suaire de Turin (la Sindone, en italien) est un drap de lin de 4,41 m de long sur 1,13 m de large sur laquelle est imprimée la double image, frontale et dorsale, d'un homme nu ayant subi une série de tortures avant d'être crucifié.
La tradition, qui en fait le linceul ayant enveloppé le corps du Christ, est contestée depuis son apparition en France, à Lirey, près de Troyes, au lendemain des Croisades, en 1353. Mais ni les tenants de l'authenticité de la relique, ni leurs adversaires n'ont réussi, à ce jour, à justifier de manière irréfutable leur position. L'église ne s'est jamais prononcée; le premier adversaire de l'authenticité fut d'ailleurs l'évêque de Troyes, au XIVe siècle. Elle a néanmoins autorisé, en 1506, un culte local dans les États de Savoie dont les souverains en détenaient la propriété depuis 1453. Conservé d'abord à Chambéry, leur première capitale, jusqu'en 1536, le Linceul séjourna à Nice entre 1537 et 1543. Il fut exposé à la vénération des fidèles le 30 mars 1537 du haut de la tour Bellanda, qui surplombe le Vieux-Nice. Ramené à Chambéry à la veille du siège de Nice par les Franco-Turcs en 1543, il fut ensuite conservé quelque temps à Vercelli (Piémont) avant de rejoindre définitivement Turin en septembre 1576. Resté propriété de la maison de Savoie après l'abolition de la monarchie en Italie en 1946, il a été légué au Vatican par le dernier roi d'Italie, Umberto II, à sa mort en 1983.
Le culte du Saint Suaire est largement répandu dans tous les anciens états de la maison de Savoie, en Savoie propre, en Piémont et dans le comté de Nice.
A Nice même, la confrérie des Pénitents Rouges est placée sous la protection de la sainte relique depuis 1506. Elle y possède la chapelle du Saint-Suaire et organise chaque année, le 5 mai, une fête votive au cours de laquelle une reproduction du Linceul est portée en procession à travers les rues de la vieille ville. Pour l'ostension de 2010, elle organise trois pèlerinages à Turin : le 14 avril, les 16 et 17 avril (Grand rassemblement des pénitents du Piémont, de Ligurie et du Comté de Nice) et du 27 avril au 10 mai (pèlerinage à pied par la "route du sel"). Parallèlement, une exposition consacrée au Saint Suaire se tient en la chapelle des Pénitents Rouges (au fond du cours Saleya) jusqu'au 23 mai.
Pour en savoir plus, lire le livre de
Roland Marghieri :
Le Saint Suaire de Turin, linceul du Christ (Serre Editeur, 2006).
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