A 55 kilomètres de Nice, le village de Roquesteron mérite une visite. Bâti de part et d'autre de l'Estéron, la localité est à elle seule une espèce de résumé de l'histoire du Comté de Nice
Fief de la puissante famille provençale des Thorame-Glandèves, qui possèdent tout le haut pays niçois aux XIe, XIIe et XIIIe siècles, elle passe aux incontrôlables Grimaldi de Beuil, avec eux se donne au Comte de Savoie en 1388 et se retrouve à la frontière entre la Provence -puis la France- et le duché de Savoie/royaume de Sardaigne. Au siècle des Lumières, l'invraisemblable tracé de cette frontière va être modifié, pour emprunter le cours de l'Estéron : Roquestéron est désormais coupé en deux, le coeur historique de la rive droite devenant français et les faubourgs plus récents de la rive gauche restant sous souveraineté sarde. Ainsi naît cette bizarrerie administrative : un seul village mais deux communes distinctes. Pendant la Révolution et l'Empire, la commune n'est pas reconstituée et après le rattachement définitif du Comté de Nice à la France en 1860, elle reste coupée en deux, pour partie rattachée à l'arrondissement de Grasse du département des Alpes-Maritimes (la rive droite, qui prend officiellement le nom de Roquestéron-Grasse -avec accent !- devenu, depuis le 18 novembre 2015 La Roque-en-Provence) et pour partie à celui de Puget-Théniers jusqu'à sa suppression en 1929 où Roquesteron-Puget (sans accent), chef-lieu de canton, est rattaché à l'arrondissement de Nice et devient Roquesteron (toujours sans accent !).
Emprunter le boulevard du Mercantour (ex-route de Grenoble) (M6202) sur 28 km jusqu'au Pont Charles-Albert, peu après Saint-Martin du Var. Franchir le fleuve sur ce pont, suivre la D17 en direction de Gilette en laissant sur la droite la route de Bonson. Poursuivre, toujours sur la D17, passer Pierrefeu pour atteindre Roquesteron. En voiture, le trajet dure environ 1 heure.
On peut rentrer à Nice en empruntant la rive droite de l'Estéron par Conségudes, Les Ferres et Bouyon, trois communes qui firent partie, comme Roquestéron-Grasse, de l'ancien Comté de Nice avant d'être rattachées au royaume de France en 1760.
En rive gauche, une promenade dans le village permet de découvrir de belles ruelles bordées de maisons présentant de beaux encadrements de portes, dont certains datés de la fin du XVIIe et du XVIIIe siècles. Dans la Voie Romaine, un cippe du IIe siècle est remployé dans un mur de maison. L'ancienne mairie, rue du docteur Passeron, était à l'origine la résidence de la famille Alziary de Malaussène, dont un des membres fut Maire de Nice de 1886 à 1896. L'église Saint Érige, construite à partir de 1735, à nef unique couverte d'une voute en berceau, renferme quelques toiles intéressantes. Des locaux qui abritèrent jadis des activités artisanales ont été restaurés par la Société du four à pain et du pressoir (association 1901 dont le but est la sauvegarde du patrimoine local) : le fou à pain, le pressoir, l'ancienne boucherie, la forge, le moulin à huile, la cordonnerie sont visitables sur rendez-vous (contacter Gilles Passeron-Seybald au 06 80 14 02 19 ou Alain Dalmasso au 06 80 30 57 30).
La traversée de l'ancienne frontière franco-sarde se fait en empruntant le Pont de France (dont les bases remontent au XVIIIe siècle) qui permet de rejoindre La Roque en Provence (Roquestéron-Grasse), coeur historique du village, tassé au pied d'un petit éperon rocheux sur lequel s'élève l'église romane Sainte Pétronille (XIIIe siècle), un bel édifice roman à nef unique doté d'un clocher mur et d'une abside en cul-de-four, fortifié au XVIe siècle. On parcourra avec intérêt les ruelles anciennes depuis la place Saint François, centre de la vie locale. Sur cette place s'élève la maison du prieur où habita peut-être le troubadour niçois Raymond Féraud, moine de Lérins, de la famille des seigneurs d'Ilonse qui composa ici, vers 1300, sa Vida de San Honorat, un long poème de 4125 vers en provençal.