Vendredi 15 janvier, le réalisateur
André Waksman présentait, en avant-première dans les locaux de la SCAM, à Paris, son tout dernier documentaire consacré à un épisode mal connu de l'histoire de la région de
Nice pendant les heures noires de la Seconde Guerre Mondiale : durant quelques mois, de novembre 1942 (occupation de la zone dite libre par les troupes de l'Axe) à septembre 1943 (armistice avec l'Italie et occupation de la zone sous contrôle italien par les armées nazies), un millier de juifs français et étrangers, traqués par le régime de Vichy, trouvèrent refuge non loin de
Nice, à
Saint-Martin-Vésubie où il jouirent d'un certain répit sous la protection de l'armée d'occupation !
En septembre 1943, la vie de cette communauté va à nouveau basculer... Après l'éviction du pouvoir de Mussolini, en juillet, l'Italie demande l'armistice avant de rejoindre le camp allié. L'armée italienne dépose les armes, aussitôt remplacée dans sa zone d'occupation (du Rhône à la frontière) par la Werhmacht, flanquée des sinistres SS et de la non moins diabolique Gestapo. Pour les juifs, un temps à l'abri, et des nazis et de la milice pétainiste, dans divers refuges du haut pays de
Nice (
Saint-Martin-Vésubie, mais aussi
Sospel ou la
Tinée), il ne reste que la fuite.
Pensant être à l'abri en Italie (on ignore alors que l'Allemagne nazie occupe l'Italie du Nord et va rendre à Mussolini un semblant de pouvoir avec la création de l'éphémère république vassale de Salò, dans le nord de la péninsule), les juifs abandonnent leurs villages d'accueil. De
Saint-Martin-Vésubie, ils traversent les hautes montagnes qui ne marquent pas encore la frontière franco-italienne, et, via la
Madone et le
col de Fenestres, rejoignent la vallée du
Gesso avec l'aide de nombreux saint-martinois. Près de 500 seront pris par les Allemands et, regroupés à
Borgo San Dalmazzo, au confluent du
Gesso et de la
Stura, finiront dans les camps d'extermination.
Les autres, aidés par les populations locales, parviendront à échapper à cette destinée tragique. C'est le cas du réalisateur
André Waksman qui, alors qu'il était âgé de trois mois, a franchi la haute barrière des Alpes de
Nice dans les bras d'autres réfugiés ou des habitants de
Saint-Martin-Vésubie qui les guidaient...
Ce constat insolite – une armée d’occupation qui protège une population occupée – a donné envie à
André Waksman d’interroger témoins et historiens sur les raisons de gestes individuels et collectifs qui, à titre personnel, lui ont sauvé la vie. Dans ce documentaire, illustré par de nombreuses images d'archives, interviennent des historiens majeurs, comme
Robert Paxton,
Marie-Anne Matard-Bonuci,
Davide Rodogno,
Jean-Louis Panicacci et
Alberto Cavaglion ainsi que des réfugiés et villageois des deux côtés des Alpes.
1943, le temps d’un répit…
un film documentaire d’André Waksman
2009 – 57’
Coproduction Vision Internationale, Monkey Bay productions, Vision Internationale Corsica, Blink (Torino), France 3 Méditerranée, France 3 Corse, Yad Vashem, avec la participation de la Fondation pour la mémoire de la Shoa, de la Collectivité Territoriale de Corse, de la Région PACA, du département des Alpes-Maritimes, le Piemonte Doc Film Fund et le CNC.
Ce film, suivi d'un débat, sera diffusé sur France 3 Méditerranée le 4 avril 2010 et sera prochainement disponible en DVD. Il sera à nouveau projeté à Paris, le 7 février, lors de la Fête du Livre et des Cultures Italiennes puis à Grenoble en mars, lors de la semaine du film sur la résistance. Une projection publique devrait également avoir lieu à Nice. |
André Waksman est un cinéaste engagé, notamment dans la défense des cultures minoritaires. Il a réalisé, entre autres :• "BISOGNU DI TÈ", (84 ') qui montre la richesse et les problèmes de la langue corse, étroitement liée à l'identité et au patrimoine d'une île qui entend en perpétuer la vitalité;• "MI KOZ KREOL" (52 '), sur l'état de la langue créole sur l'île de La Réunion, et de ses spécificités par rapport à bien d'autres langues régionales;• "HAWAII : L'HERITAGE RETROUVE" (52'), consacré à la renaissance culturelle du 50e état américain et à la réappropriation de leur langue par les Hawaïens;• "GÉNÉRATION VOLÉES" (52 '), tourné en Australie, dans le territoire du Nord, où les Aborigènes représentent 25 % de la population mais 75 à 80 % de la population carcérale.