Lettre ouverte aux supporters du Gym
Le 14 Octobre 2011,
Nous avons déposé une requête contre le permis de construire du Nice-Stadium. Vous êtes nombreux à nous avoir fait part d’un mécontentement mêlé d’un grand ras le bol pour les uns, d’encouragements pour les autres.
Comme vous, nous regrettons le temps perdu et les occasions manquées par cette municipalité, comme par la précédente, pour doter l’OCG Nice d’un stade digne de ce nom. Comme vous, la multiplication des projets nous exaspère. Comme vous nous sommes pressés de voir nos aiglons évoluer dans une infrastructure digne de la 5ème ville de France.
Pour autant, devons-nous tout accepter au nom de cette passion commune pour notre club? Devons-nous faire semblant de ne pas voir l’inacceptable au prétexte que dans cette affaire mieux vaut ne pas se mettre les supporters à dos ?
Certains considèrent que nous nous acharnons trop à dénoncer ce projet, au lieu de « laisser faire ».
Ce n’est pas de l’acharnement : quand vous êtes témoin d'un pillage, se taire c'est soit être complice, soit faire preuve d'une grande lâcheté. Dans le cas présent nous préférons continuer à pouvoir nous regarder dans une glace....
Est-il possible de faire autrement et beaucoup moins cher ? Oui. Un seul exemple le stade de Valencienne, inauguré il y a quelque mois: 25.000 places pour 75 millions d'euros. Celui de Nice coûte et va coûter aux contribuables: immédiatement 60 millions d'euros d'apport, plus le versement par la ville d'une redevance de l'ordre de 10,5 à 11 millions par année pendant 27 ans, soit au total 345 millions d'euros. Sans parler des aménagements extérieurs (voirie, parkings, voie des 40m, station de tram.... quasiment une centaine de millions d'euros) et les « imprévus»… Entre 75 millions à Valencienne et 345 et plus à Nice il y a une marge que nous considérons relever du pillage des fonds publics, les nôtres, les vôtres.
Et ce n'est pas tout!
A ce pillage s'ajoute la privatisation du domaine public que constitue le cadeau fait à Vinci des terrains attenants au stade pour un « programme immobilier d'accompagnement » de 30 000 m2. Vinci est titulaire d’un bail à construction pour 99 ans-loyer un euro par an- en contrepartie de 25 millions d'euros HT payés à la ville, aujourd’hui. Au bout de l'opération le « gain » pour Vinci va se chiffrer en centaines de millions d'euros, le même manque-à-gagner pour la Ville de Nice.
Il va sans dire que cet argent ainsi dilapidé c'est de l'investissement et du fonctionnement en moins pour le sport en général et les petits clubs en particulier. Ils sont le maillage indispensable au développement du sport de haut niveau, aujourd'hui ils sont en grande difficulté.
Ce montage financier (partenariat public-privé) permet de ne pas augmenter les impôts dans l’immédiat et de laisser les générations futures se démerder… D’ailleurs ce type de montage, à l’image des prêts toxiques, commence à provoquer des déboires financiers parmi les collectivités locales.
La vérité, c'est que le Gym n'est que le prétexte à une immense opération immobilière et commerciale sur la plaine du Var et sur l'emplacement du Ray, sur le dos des finances publiques. Ce stade de 35.000 places dont le projet dit lui-même que 15 à 20.000 seraient suffisante, sera de toute évidence un entonnoir à bagnoles, la desserte en transports urbains étant très mal prévue.
La vérité c’est que le Gym n’est que le prétexte à urbaniser de manière anarchique avec des opérations hyper-rentables pour les entreprises privées, pendant que les besoins de la population sont laissés de côté. Quid d’un hôpital, quid d’une véritable ligne de RER desservant la zone d’emploi de Carros-Le Broc, quid d’un véritable éco-quartier sauvegardant les parcelles maraîchères vitales pour l’approvisionnement de la ville et l’emploi agricole bien maltraité par la délocalisation imposée du MIN ?
Au total avec la même somme consacrée au Nice-Stadium nous pourrions avoir un stade correspondant aux vrais besoins de Nice, et de l’argent public encore disponible pour d’autres équipements.
A l’heure où beaucoup stigmatisent la dette publique, ce pillage de l’argent public et de la ressource environnementale que nous laissons aux futures générations nous est insupportable.
Amicalement,
Robert INJEY, Emmanuelle GAZIELLO
Conseillers municipaux de Nice