NICE PERNAUT LEVY SEMPÉ - Telle une vilaine tâche d’huile, le ricanement répand son fiel dans les médias.
Rares sont les émissions de télévision où les donneurs de leçons ne se livrent pas au dénigrement systématique de telle ou telle personnalité. Le «
flingage tous azimuths » s’érige désormais en nouvelle « mode » de pensée. Ce cruel usage du ricanement, habituellement réservé aux humoristes, mérite d’être décrypté.
Le « méchant » bouscule le « gentil » dans la boutique médiatique où tous les coups sont permis : le public raffolerait de ces joutes oratoires, selon ceux qui se prétendent experts de la chose télévisuelle. Sauf que, parfois les téléspectateurs demeurent insensibles au ricanement. Prenons le cas de Jean-Pierre Pernaut, le présentateur- le plus raillé de France par certains collègues, figure en revanche parmi les « journalistes préférés des français ». Il est le seul, dans l’info télé à afficher un insolent Audimat : 7 millions de téléspectateurs.
Cette audience a intéressé Nicolas Sarkozy. « L’Elysée commande un Pernaut », titrait Libération lorsque ce dernier a animé l’émission de TF1 où des téléspectateurs interrogeaient le chef de l’Etat. Un rôle inconfortable pour un journaliste. Jean-Pierre Pernaut qui signe, par ailleurs, un journal de 13 h un tantinet « franchouillard » mérite-t-il de subir autant de sarcasmes ? Persuadés d’appartenir à une élite, ces parangons de vertu, en le dénigrant, ne témoignent-ils pas d’un certain mépris pour le public ?
Daniel Schneidermann, sur son site Arrêt sur images, porte secours au « malheureux » Jean-Pierre Pernaut, victime du ricanement, « facile et tellement confortable. Il met tout le monde d’accord. Le ricanement sur Pernaut est finalement aussi consensuel que son journal ! »
Une fois le présentateur de TF1 passé au pilori, les « ricaneurs » s’en prennent à un écrivain normalien, agrégé de philosophie, star médiatique : Bernard-Henri Lévy. Le site littéraire du Nouvel Observateur a révélé le 8 février que B.H.L, attaquant Kant dans De la guerre en philosophie, s’appuyait sur un auteur fictif « Botul ». Le philosophe a reconnu s’être laissé piéger. Aussitôt, de nombreux médias se sont déchainés pour discréditer l’ensemble des écrits de BHL.
Et c’est à un véritable réquisitoire à l’encontre du philosophe auquel ce sont livrés deux ricaneurs professionnels, talentueux, Eric Zemmour et Eric Naulleau, sur le plateau d’ « On n’est pas couché », le 13 février. Les deux polémistes se sont acharnés sur BHL qui a répliqué avec ironie : « il y a une telle confusion dans ce que vous dites ». Eric Zemmour, auteur à la plume alerte, a osé, non sans fausse modestie : « Vous écrivez moins bien que Chateaubriand mais c’est le cas pour nous tous ».
se montrent beaucoup moins offensifs lorsqu’ils reçoivent et interviewent complaisamment,
» assurent ses fans. Les ricaneurs n’auront pas le dernier mot. Il appartient, aujourd’hui, au dessinateur mondialement connu,
( 77 ans). Il confiait à l’Express en juillet dernier :«
». Cela m’a amusé. J’ai eu envie de faire un dessin là-dessus mais j’ai vite abandonné l’idée, car j’ai senti que j’allais ricaner. Or je déteste les ricanements.
», s’est sans doute trompé d’époque.