NICE CAGNES PÊCHE POUTINE - Après une première tentative
mardi 4 mars 2008 qui s’est soldée par un faux départ dû à une météo non favorable, c’est finalement mercredi matin que les pêcheurs du
Cros-de-Cagnes, tout près de
Nice, ont activé le chronomètre de la
pêche de la poutine pour une durée effective de 45 jours, réglementée par le quartier maritime de
Nice, qui décide seul de l’arrêt ou de la poursuite. Cette belle pêche séculaire est un privilège conservé aux pêcheurs de notre région, une pêche bien ancrée dans les traditions niçoises.
La poutine est composée d’alevins dits de poisson bleu : ce sont les alevins de sardines, le caviar du
Comté de Nice, bien apprécié de tous.
2008, une ouverture pas comme les autres, puisque endeuillée par la disparition rapide d’un pêcheur : Jean-Pierre, qui faisait partie depuis de nombreuses années de l’équipe de
pescadou d’
Antoine Saissi, patron pêcheur au
Cros de Cagnes. A 6 h 30, le pointu quitte le
port du Cros, longe les plages pour en choisir une, puis très vite, le premier bout de corde reliant le côté gauche du filet, appelé
levante par les pêcheurs, est lancé à un
pescadou resté sur la plage. Le bateau s’éloigne vers le large, environ 250 à 300 mètres, afin de déployer le filet (
la seine de plage, le bourgin, la savega selon les régions) qui va former un immense arc de cercle.
Il faudra 20 bonnes minutes aux trois hommes du bateau pour exécuter cette manœuvre délicate et revenir de l’autre côté, au
ponant (à l’est) où d’autres pêcheurs attendent la seconde extrémité de la corde afin de commencer le travail lent du
hallage. Les efforts commencent à marquer les visages des pêcheurs : c’est la première
cale de l’année ! Tous sont concentrés alors qu’arrivent en même temps sur la plage les deux
bourdoun, les bois qui renforcent les deux ailes du début du filet. A partir de ce moment les pêcheurs se rapprochent pour former deux lignes parallèles, la cadence s’accélère, et les efforts sont de plus en plus intenses.
Quelques instants plus tard, le flotteur jaune, témoin de l’entrée de la poche du filet (
la margue) apparaît à nos pieds. Le filet à mailles fines, tel un piège, se referme sur les alevins. Après deux ou trois autres tirées, la
margue se tend et se gonfle sur l’aspiration d’une ultime vague, qui laisserait croire que la mer retient un court instant le filet.
Le filet posé à terre, les pêcheurs hissent rapidement le pointu et se hâtent pour constater le résultat de leur pêche. Alors !
poutine ou pas
poutine !
La poche ouverte, ils sont un peu déçus. Ils mettent en caisse quelques sèvero et autres petits poissons, tout juste un kilo, et, dans le fond du filet, reste aggloméré un amas de carnasse, carmarina en niçois, tout simplement du plancton avec quelques grains de poutine. Le filet est rapidement chargé dans le pointu qui s’en retourne au port. On refera un autre essai dans quelques jours, dit le patron pêcheur à ses hommes : la poutine n’a pas encore abordé (elle ne s’est pas rapprochée suffisamment du bord).
Au bout du compte, ce privilège séculaire, attaché aux traditions de la région de
Nice, est partagé par les pêcheurs avec ceux qu’ils aiment autour d’une belle table, en famille ou entre amis garnie d’une belle omelette, de beignets et même de soupe.
Il reste simplement à espérer que le cru 2008 fasse vite oublier celui de 2007 qui fut une vraie catastrophe pour nos papilles gustatives et pour les derniers
pêcheurs du Cros.