CONSIGLIO D'ORNATO URBANISME - Dans le cadre du cycle des dix-neuf conférences 2005-2006 proposé par le Centre Culturel de la Providence et l'Acadèmia Nissarda, sur le thème
Nice et son comté de la Restauration à 1860,
Hervé Barelli propose, ce lundi 12 décembre 2005 à 17h30 :
“Développement urbain et Consiglio d’Ornato (1824-1858)”. Le "
Consiglio d'Ornato", institué par le roi
Charles-Albert en 1832, a eu pour charge de veiller au développement harmonieux de la ville, à l'amélioration des grands axes, des quais et ponts, à la création d'espaces nouveaux tels que places et boulevards, à l'achèvement des façades d'églises. La construction privée, pour les façades, est aussi soumise à son approbation
• La critique récente a peut-être un peu trop souligné les limites de cette institution, ses excès de pragmatisme et de théorie à la fois (par exemple son indifférence aux intérieurs et l'autoritarisme de certains grands projets). Ces défauts sont aussi des qualités, car il faut replacer le Consiglio dans la lignée séculaire et internationale des grands desseins de cour, que seules les monarchies sont capables de concevoir : attention extrême au décor, à l'harmonie, prééminence d'un Beau absolu en architecture. Comparé aux prescriptions du
Second Empire, puis plus encore à celles de la République, le
Consiglio d'Ornato est le dernier véritable plan d'embellissement se donnant franchement comme tel, considérant encore, et pour la dernière fois, l'architecture avant tout comme un art, avec ses propres spéculations esthétiques. On comprend mieux alors pourquoi ce Conseil, qui a seulement fonctionné de 1832 à 1860, a laissé une empreinte aussi forte et une nostalgie aussi grande : ce n'est pas son efficacité en termes de quantité qui est en jeu mais, selon le principe aristocratique, sa qualité.
• Les principes, simples, reviennent résolument aux
classicisme et
néo-classicisme : alignements réguliers jusqu'à la monotonie exaltant la grandeur métrique (façades), emploi limité d'ornements strictement architectoniques (bossages, refends, pilastres et surtout frontons triangulaires), symétrie rigoureuse, régularité des entraxes, absence de ressauts. Ces règles, convenablement appliquées (respect de proportions réputées harmonieuses), produisent un effet connu d'avance
• Il convient de souligner le caractère rationnel et omnipotent de ce style néoclassique qui permet d'habiller églises (du Vœu), hôpitaux (Saint Roch), immeubles de rapport (rues Ségurane, Cassini) ; de simples variations d'échelle donnent à chaque programme une expression spécifique et appropriée. La simplicité de la mouluration et des tracés se conjugue avec la modestie des matériaux (brique, mœllons, maçonnerie enduite) pour produire à peu de frais un effet esthétique maximal. Ce qui explique l'aboutissement de nombreux chantiers par rapport au nombre de projets
• Il serait tentant de critiquer la sécheresse du décor, si l'on avait la maladresse d'oublier le contexte architectural d'alors : les permis de construire montrent dès 1840-50 une tendance à l'exubérance éclectique (notamment pour des raisons mercantiles avec les devantures de commerces et les immeubles de rapport) que le Conseil devait impérativement endiguer, pour éviter le chaos stylistique qui sera retardé ainsi jusqu'à la Belle Epoque. Par ailleurs, la plupart des grandes réalisations ont été soit gommées (les grands alignements à la pétersbourgeoise des quais de la ville neuve), soit grossièrement altérées (perspectives sur
l'église du Vœu et sur l'
hôpital Saint Roch fermées par la Gare routière et le
Musée d'art moderne)
• Enfin, quelques traits révèlent ingéniosité et invention : le tracé des boulevards d'enceinte est repris par l'administration française ; certains secteurs forment des opérations-pilote sur des terrains mis en vente avec contrôle des constructions (immeuble 99
quai des Etats-Unis, 1843, sur les anciens bastions)
• La
rue Cassini, la place du port (palais jumeaux), la
place Masséna, l'hôpital Saint Roch, l'église du Vœu, quelques immeubles quai des Etats-Unis sont les témoins de ce programme d'embellissement qui a fait de la Nice de 1840 l'équivalent de
Dresde, Londres, Paris, Naples, Turin, Saint-Pétersbourg, démontrant à travers l'architecture correctement employée l'appartenance à un groupe de capitales civilisées.
Pour en savoir plus sur les conférences, n'hésitez pas à contacter le CENTRE CULTUREL DE LA PROVIDENCE
4, Placette de la Providence - 06300 Nice Tél : 04 93 80 34 12