Dans le décor féérique du col d'Èze, sur la Grande Corniche, qui, depuis le Premier Empire, relie
Nice à
Menton, un restaurant renommé pour sa carte arbore fièrement son enseigne : "
Auberge de la Croix du Pape".
A lui seul, le nom de cet établissement, qui jouit d'un magnifique panorama s'étendant de l'Estérel au derniers contreforts de l'Apenin ligure, interpelle tous ceux qui passent en ces lieux.
A l'angle ouest de cet ancien moulin, transformé en auberge au début du XIXe siècle, peu après l'ouverture de la route impériale, s'élève une petite stèle surmontée d'une jolie croix en pierre.
L'inscription, à peine lisible, est écrite en latin épigraphique, ce qui ne facilite pas sa lecture.
Elle nous apprend que le 11 février 1814, le pape
Pie VII, en route pour Gênes en regagnant Rome, fit halte en ces lieux et donna sa bénédiction.
La stèle fut élevée peu après, sous le règne de Victor Emanuel Ier.
Rappelons brièvement que
Pie VII (Luigi Barnabà Chiaramonti, 1742-1800-1823), co-signataire du Concordat de 1802 avec la France post-révolutionnaire, eut, avec Napoléon, des relations difficiles qui s'achevèrent par l'enlèvement du Souverain Pontife dans ses appartements du Quirinal à Rome, le 5 juillet 1808. Gardé prisonnier en Italie, il fut transféré, sur ordre de Napoléon, à Fontainebleau en juin 1812. Contraint de renoncer officiellement à sa souveraineté temporelle sur les États de l'Église en 1813, il se rétracte aussitôt et reste prisonnier de l'Empereur (qu'il qualifie de "
Comediante ! Tragediante !" selon une réplique passée à la postérité) jusqu'en janvier 1814.
Le 19 janvier, Napoléon se voit contraint de lui restituer ses états et, le 23 du même mois il quitte Fontainebleau définitivement. Après une courte escale à
Nice, il passe donc au col d'Èze le 11 février et entre triomphalement à Rome, abandonné par Murat, le 24 mai. Les Cent Jours le conduisent à nouveau à s'exiler mais la chute définitive de Napoléon le ramènent au Vatican le 22 juin 1815, où il meurt le 20 août 1823. Rappelons, pour l'anecdote, que, jusqu'à Jean-Paul II, plus aucun pape n'est venu en France après Pie VII.
Pie VII accueilli par les autorités civiles et religieuses du Comté lors de son passage à Nice en février 1814